A l’ombre du Baron de Fabienne Josaphat

« A l’ombre du Baron est un premier roman qui impressionne, une lettre d’amour à Haïti et son peuple » Miami Herald

Originaire d’Haïti, vivant aux États-Unis, Fabienne Josaphat, signe avec « À l’ombre du baron » une premier roman poignant, une ode à un peuple, une fiction mais tellement réelle qu’on est plongé à Haïti et tout comme les haïtiens, on aura du mal à s’extirper des « tontons macoutes » et du régime de Papa Doc…

On est transporté en 1965, François Duvalier, alias « Papa Doc » ou « Baron Samedi« , fait régner la terreur. Haïti, vit au rythme de la peur des dénonciations, parfois un simple soupçon et les tontons macoutes débarquent, rouent de coups sous n’importe quel prétexte ! Tout le monde soupçonne tout le monde.

Se dresser contre le dictateur, c’est signer, son incarcération dans la sinistre prison de Fort Dimanche, ou sa mise à mort…

Raymond, chauffeur de taxi, peine à joindre des deux bouts depuis l’instauration du couvre-feu, et fait tout pour que ses enfants et sa femme vivent dignement. Mais les repas se font rares, la peur, les questions existentielles… tout rappel que cela va mal !

Nicolas, son frère,  a une belle vie. Mais a une attitude condescendante avec son frère, se pensant supérieur parce qu’il a de l’argent et qu’il a fait des études. Lors d’un cours, il parle de droits de l’Homme mais surtout il écrit un livre sur des disparitions dont celle de Jacques Stephen Alexis (Écrivain haïtien connu pour sa résistance à la dictature de François Duvalier, son œuvre romanesque, ainsi que sa définition novatrice d’un réalisme merveilleux propre à la littérature de la Caraïbe.) Suite à dénonciation par un de ses étudiants il sera emprisonné à Fort Dimanche.

« Nous ne sommes une priorité pour personne sauf nous. »

Sa date d’exécution est fixée rapidement, après avoir subi la pire des tortures, tout cela sans procès !

Les deux frères, pourtant deux étrangers l’un pour l’autre, vont être transformés par cette épreuve, leur vie va basculer…

« Les yeux dans le vide, il entendit les gardes transporter le corps dans le couloir. Puis il enfouit sa tête dans ses genoux. Y trouva l’obscurité, la sécurité, un refuge où se prendre les cheveux à deux mains et les arracher d’un crâne dans lequel la démence s’insinuait déjà. Il cessa de lutter et s’effondra, écoutant le ricanement moqueur qui caquetait sous les prières, le rire d’un Dieu farceur tapi dans les recoins de Fort Dimanche : la Mort, ajustant son chapeau claque, exhalant la fumée de son cigare, ondulant des hanches, dansant autour de leur cellules, bras grands ouverts dans un geste d’accueil. La Mort se payait sa tête. »

Un livre qui ne peut laisser indifférent, un devoir de mémoire qui rappel à quel point tout est encore d’actualité…

Il m’est très difficile d’exprimer avec des mots ce que j’ai pu ressentir en lisant « A l’ombre du Baron » J’étais persuadée de lire un thriller horrifique avec en toile de fond les traditions  vaudou et autre sorcellerie…. J’ai été émue, bouleversée et choquée des conditions décrites par l’auteur. A aucun moment je n’ai senti que nous étions en 1965, tellement le présent est palpable et tellement cela fait écho à la condition de vie de plusieurs citoyens de par le monde…

François Duvalier, surnommé « Papa Doc« , fut Président d’Haïti de 1957 à 1964 puis dictateur (« Président à vie« ) de 1964 à sa mort, en 1971. Son règne fut empreint de corruption et marqué par l’utilisation de milices privées, les tontons macoutes. J’ai été révoltée par ce climat de terreur dans lequel le peuple haïtien tente de survivre.

Mes morts dorment dans cette terre ; ce sol est rouge du sang de générations d’hommes qui portent mon nom ; je descends par deux fois, en lignée directe, de celui-là même qui fonda cette nation. Aussi ai-je décidé de rester ici et peut-être d’y mourir.  Jacques Stephen Alexis, écrivain (1922-1961) – Extrait d’une lettre à François Duvalier, 2 juin 1960

« Papa Doc », nommé ainsi lorsqu’il commence à pratiquer la médecine dans les régions rurales et qu’il s’attire les faveurs des populations, consolide son pouvoir, il réanime les traditions du vaudou, prétend  être un « hougan » : chef spirituel de la religion vaudou, organisateur des cérémonies, celui par lequel passent les esprits (lwas) qui désirent transmettre un message au monde des vivants. A la mort de John Fitzgerald Kennedy, il prétend que l’assassinat est dû  à un sort jeté par lui.

Duvalier a également modelé son image sur celui du « Baron Samedi », pour se rendre encore plus imposant. Il mettait souvent des lunettes de soleil et parlait avec un fort ton nasal associé au Loa.

L’auteur a su retranscrire avec talent les peurs, les sensations, les odeurs, les paysages… Bref tout est tellement beau et tellement noir en même temps ! A l’image de l’être humain et de la dictature que vit ce peuple. Bourreaux et victimes se côtoient. L’auteur a fait un vrai travail de recherches et cela se sent dans son récit. Beaucoup de haïtiens ayant fui leur pays, se recon5naitront dans cette histoire.

Ce roman a beau être une fiction, les faits rapportés sont bien réels, ainsi que la prison de Fort Dimanche et les conditions de vie.

Parution : 15 mars 2017 ÉditionCalmann-Lévy Prix  broché : 19,90€ Pages : 288 – Genre : Policier – historique – Suspense

Originaire de Haïti, Fabienne Josaphat est diplômée de la Florida International University et vit aujourd’hui à Miami. La presse compare déjà ce premier roman à La Brève et Merveilleuse Vie d’Oscar Wao de Junot Diaz et Au temps des papillons de Julia Alvarez.

ABC 2017 _ Policier / Thrillerchallenge polar et thriller 2016-2017

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Catégories :Historique, Thrillers/Polars

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20 réponses

  1. Un roman marquant donc ! Je note…

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  2. Tu me tues, Ju !! 😆 Et j’ai toujours pas retrouvé la mémoire ! mdr

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  3. Super chronique, qui ne laisse pas indifférent…Maintenant je ne sais pas si je lirais ce roman, faute de temps…Mais je fais suivre !!

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  4. Bravo pour la chronique. Vraiment bien faite!!

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  5. et bien apparemment… en 2 mots « thriller fantastique » on est en plein dedans! ça ne semble pas s’arrêter à l’horrifique et au rêve alors bravo pour l’imaginaire ancré dans la realite! faudra que je le lise vu ce que tu en as retranscrit ☺

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  6. Quand on se réfère à la couverture on peut se demander… et mon 1er retour de ME même les 2 déjà obtenus qui m’intéressent (en tous j’en ai 3) me permettent de te dire… on ne fait pas de Fantastique sans être réaliste… faut le comprendre pour parler d’un livre multi genres comme celui-ci en connaissance je pense

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  7. Je viens de terminer celui-la d’une autre haitienne, FOL AMOUR de M. PAPILLON, il est absulument fantastique !

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