Premières lignes… L’ami imaginaire de Stephen Chbosky

Organisé par Ma lecturothèque : le principe est de citer les premières lignes de la lecture en cours. Pour ma part, comme je ne suis pas toujours à jour, j’ai fait une catégorie dédiée, que vous retrouverez dans le menu.

50 ans plus tôt…

Reste dans la rue. Ils ne peuvent pas t’attraper si tu restes dans la rue.

Le petit David Olson savait qu’il était dans de sales draps. Dès que sa mère rentrerait avec papa, il y aurait droit. Son seul espoir, c’était l’oreiller glissé sous la couverture, pour faire croire qu’il se trouvait encore dans son lit. Comme dans les séries télé. Mais tout cela n’avait plus d’importance maintenant. Il était sorti en douce par la fenêtre, il était descendu en s’accrochant au lierre, il avait glissé et s’était fait mal au pied. Ce n’était pas trop grave. Pas comme son grand frère, au football. Ce n’était pas trop grave ça.

Le petit David Olson descendit Hays Road en clopinant. La brume sur son visage. Le brouillard s’installait sur la colline. Il leva les yeux vers la lune. Elle était pleine. Pour la deuxième nuit d’affilée. Une lune bleue. Comme lui avait dit son grand frère. Comme la chanson sur laquelle maman et papa dansaient parfois. À l’époque où ils étaient heureux. Avant qu’ils aient peur, par sa faute.

Blue Moon.

You saw me standing alone.

Le petit David Olson entendit un bruit dans les fourrés. L’espace d’une seconde, il crut que c’était peut-être encore un de ses rêves. Mais non. Il savait bien que non. Il s’obligea à rester éveillé. Malgré les migraines. Il devait y aller ce soir.

Une voiture passa, noyant le brouillard dans la lumière des phares. Le petit David Olson se cacha derrière une boîte aux lettres, alors que du rock’n’roll se déversait de la vieille Ford Mustang. Deux des ados rigolèrent. Beaucoup de gamins étaient incorporés dans l’armée et les délits de conduite en état d’ivresse augmentaient. À en croire son père, du moins.

« David ? » murmura une voix. Tranchante. Un sifflement.

Quelqu’un avait prononcé son nom ? Ou l’avait-il juste entendu dans sa tête ?

« Qui est là ? » demanda-t-il.

Silence.

Ça devait être dans sa tête. Tout allait bien. Au moins, ce n’était pas la dame à la voix sifflante. Au moins, il ne rêvait pas.

Si ?

David regarda, au pied de la colline, le gros lampadaire allumé au coin de Monterey Drive. Les adolescents passèrent devant, emportant tous les bruits avec eux. David vit alors l’ombre d’une personne. Une silhouette se tenait au centre de la flaque de lumière. Elle attendait et sifflotait. Elle sifflotait et attendait. Une chanson qui ressemblait un peu à

Blue Moon.

Les cheveux de David se dressèrent sur sa tête.

N’approche pas de ce coin de rue.

Reste à l’écart de cette personne.

Le petit David Olson coupa à travers les jardins.

Il s’approcha d’une vieille clôture, à pas feutrés. Il ne faut pas qu’ils t’entendent. Ou qu’ils te voient. Tu as quitté la rue. C’est dangereux. Par une fenêtre, il vit une baby-sitter qui se bécotait avec son petit copain pendant que le bébé pleurait. Mais on aurait cru un chat. Il était toujours certain de ne pas rêver, mais c’était de plus en plus difficile à dire. Il se faufila sous la clôture et salit son pantalon de pyjama dans l’herbe humide. Il savait qu’il ne pourrait pas cacher les taches à sa mère. Elle lui poserait des questions. Auxquelles il serait incapable de répondre.

Pas à voix haute.

Il avança à travers le petit bois derrière la maison des Maruca. Passa devant le portique que M. Maruca avait installé avec ses fils. Après une dure journée de travail, il y avait toujours deux Oreo et un verre de lait qui les attendaient. Le petit David Olson les avait aidés une ou deux fois. Il adorait les Oreo. Surtout quand ils étaient un peu mous et vieux.

« David ? »

Le murmure était plus fort. Il se retourna. Personne. Il scruta le lampadaire au-delà des maisons. L’ombre humaine avait disparu. La silhouette pouvait être n’importe où. Elle pouvait se trouver juste derrière lui. Oh, par pitié, faites que ça ne soit pas la femme qui siffle. Par pitié, faites que je ne dorme pas.

Crac.

La brindille se brisa dans son dos. Oubliant sa douleur au pied, le petit David Olson se mit à courir. Il traversa la pelouse des Pruzan, jusque dans Carmell Drive, et tourna à gauche. Il entendait des chiens haleter. Se rapprocher. Mais il n’y avait pas de chiens. C’étaient uniquement des bruits. Comme les rêves. Comme le bébé chat qui pleurait. Ils couraient derrière lui. Alors, il accéléra. Ses petites bottines frappaient le trottoir mouillé. Smac smac, un baiser de grand-mère.

Lorsqu’il atteignit enfin le coin de Monterey Drive, il tourna à droite. Et courut au milieu de la rue. Un radeau sur une rivière. Reste dans la rue. Ils ne peuvent pas t’attraper si tu restes dans la rue. Il entendait les bruits des deux côtés. De petits sifflements. Des chiens qui haletaient. Donnaient des coups de langue. Des bébés chats. Et toujours ces murmures.

Parution : 17 juin 2020 – Editions Calmann-Lévy – Traduction : Jean Esch – Pages : 416 – Genre : fantastique, horreur

4ème de couverture :

Une mère et son fils en cavale trouvent refuge dans la petite communauté de Mill Grove, en Pennsylvanie.
Mais dans ce havre de paix, le petit garçon disparaît.
Quand il émerge de la forêt six jours plus tard, il a l’air indemne.
Lui seul sait que quelque chose a changé.
La voix du bois est dans sa tête et lui dicte une mission.
S’il ne lui obéit pas, sa mère et tous les habitants de Mill Grove risquent son courroux…

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5 réponses

  1. Après ce petit tour sur ton blog, j’aime à comparer nos lectures. Même si je pense ne pas atteindre ton rendement, je suis heureuse de voir que certains sont dans ma liseuse, dont celui-ci. A bientôt.

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  1. Stephen Chbosky – L’ami imaginaire | Sin City

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