Les avis de Myrlit : L’Immeuble Yacoubian de Alaa El Aswany

L’immeuble « Yacoubian » dont la construction remonte à l’année 1937 se trouve dans le centre du Caire. Ses habitants appartenaient à la haute société égyptienne, toutes origines confondues. Suite à la révolution de 1952, la plupart des résidents sont partis pour laisser la place aux officiers de l’armée.

Petit à petit la terrasse en haut de l’immeuble s’est transformée en habitations de fortune pour des travailleurs pauvres avec leurs familles. Au fil des années, l’immeuble devient un melting-pot représentatif de toutes les strates de la société égyptienne. Vestige d’une époque disparue, il est le reflet du schisme qui a lézardé le pays.

Dans un style épuré et tout en finesse, Alaa El Aswany décortique l’âme humaine en dévoilant toute sa splendeur et ses bassesses à travers une panoplie de personnages.

Parmi ceux que nous rencontrons il y a « Zaki », l’aristocrate nostalgique d’un Caire multiculturel et raffiné ; le bigot et fourbe « Azzam »; « Boussaïna », la jeune femme belle et pauvre ; « Hatem », l’intellectuel homosexuel; et « Taha », le jeune étudiant pauvre qui voit ses rêves se fracasser.

Dans cette société où l’abus de pouvoir est monnaie courante, l’extrémisme religieux trouve la brèche pour croître et engouffrer une jeunesse désabusée et écrasée par un régime violent et corrompu.

« L’Immeuble Yacoubian » n’est pas sans rappeler les œuvres de Naguib Mahfouz et son réalisme social, mais dans sa description de la mutation sociale El Aswany va plus loin avec sa liberté de ton, et ce, pour notre plus grand bonheur.

Parution : 9 janvier 2006 – Éditeur : Actes sud – Traduction : Gilles Gauthier –Pages : 336 – Genre : étude sociétale, corruption, politique

Construit en plein coeur du Caire dans les années 1930, vestige d’une splendeur révolue, l’immeuble Yacoubian constitue un creuset socioculturel très représentatif de l’Egypte du XXIe siècle naissant. Dans son escalier se croisent ou s’ignorent Taha, le fils du concierge, qui rêve de devenir policier ; Hatem, le journaliste homosexuel ; le vieil aristocrate Zaki, perdu dans ses souvenirs ; Azzam, l’affairiste louche aussi bigot que lubrique ; la belle et pauvre Boussaïna, qui voudrait travailler sans avoir à subir la convoitise d’un patron… Témoin d’une époque, Alaa El Aswany pose, sans juger, un regard tendre sur des personnages qui se débattent tous dans le même piège, celui d’une société dominée par la corruption politique, la montée de l’islamisme, les inégalités sociales, l’absence de liberté sexuelle, la nostalgie du passé. Au.delà des problématiques égyptiennes, en digne héritier d’un Dostoïevski, d’un Zola ou d’un Mahfouz, c’est de l’homme que parle Alaa El Aswany, de ses vices et de ses faiblesses, de ses rêves et de ses échecs, et le miroir qu’il tend, pour indulgent qu’il soit, n’en est que plus effrayant.



Catégories :Les avis de MyrlitBooks

2 réponses

  1. J’avais beaucoup aimé cette galerie de personnages, qui finalement dresse au tableau assez noir, mais passionnant, d’une réalité sociale qu’ils permettent d’appréhender avec finesse. L’auteur est également passionnant à entendre.

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