Sur un air de Fado de Nicolas Barral

Depuis quelques temps, je découvre le format BD qui permet d’aborder des thématiques de plus en plus travaillées, notamment ici avec un hommage au Portugal et à son histoire.

L’histoire débute à Lisbonne, été 1968, avec la chute physique de Salazar, prémices de sa chute réelle, puisqu’il est contraint de renoncer au pouvoir suite à un AVC. Il décédera 2 ans plus tard. Salazar met en place l’Estado novo (l’État nouveau), un régime autoritaire, conservateur, catholique et nationaliste. L’État nouveau est anti-communiste sans pour autant développer un régime Fasciste.

L’auteur met en scène certains acteurs de cette dictature, tout en mettant en avant les opposants au pouvoir en place.

Fernando Pais, médecin, ferme les yeux sur ce qui l’entoure tout en profitant de la douceur de vivre que lui procure Lisbonne, mais sa rencontre avec un gamin, graine de révolutionnaire, le fait sortir de sa rêverie et son cœur balance, chavire entre acceptation et refus d’un régime qui a conditionné son désarroi et son acceptation. Son indécision palpable, au point parfois de se demander s’il n’est pas un des acteurs principaux, vole peu à peu en éclat et le mène à la conquête de son courage, mais aussi de la prise en main de sa vie.

Les sentiments sont assez bien présents, la retranscription des sentiments, indécisions ou révolte est bien présente et palpable, avec une pointe de cynisme qui permet certainement de naviguer et se protéger d’une situation qui déplaît.

La culture, la langue portugaise, sont un mystère pour moi, pourtant, je ressors de ma lecture avec le sentiment d’avoir fait une excursion dans Lisbonne, grâce aux nombreuses expressions portugaises, que l’auteur parsème dans le récit : « Bon dia Doutor », « Viva a liberdade », « Bem Vindo a casa Senhora Pais », « Deus, por quê o meu filho ? », on ne s’y trompe pas, on est bien au Portugal ! C’est franchement bien construit, avec l’aspect historique bien présent, des planches très visuelles et des personnages attachants.

Le récit fleure bon le Portugal, avec certaines scènes romantiques, l’aspect dramatique de l’Histoire est bien présent, tout au long du récit, comme une épée de Damoclès qui viendrait fondre sur toute tentative de contestation. L’opposition est tuée dans l’œuf, sans lui laisser la possibilité de voir le jour, malgré une pointe de lassitude des partisans. 

L’album est facile à lire, les dessins se suffisant à eux-mêmes, notamment avec certaines planches dépourvues de bulles… Apportant une certaine intimité, entre le lecteur, les personnages et l’Histoire. L’auteur se contentant de raconter des tranches de vie, sans jamais chercher à démontrer qui a tort ou raison, se centrant que l’évolution du personnage et la découverte de son passé apportant un éclairage qui maintient l’intérêt.

Lisbonne, été 1968. Depuis 40 ans, le Portugal vit sous la dictature de Salazar. Mais, pour celui qui décide de fermer les yeux, la douceur de vivre est possible sur les bords du Tage. C’est le choix de Fernando Pais, médecin à la patientèle aisée. Tournant la page d’une jeunesse militante tourmentée, le quadragénaire a décidé de mettre de la légèreté dans sa vie et de la frivolité dans ses amours. Un jour où il rend visite à un patient au siège de la police politique, Fernando prend la défense d’un gamin venu narguer l’agent en faction. Mais entre le flic et le médecin, le gosse ne fait pas de distinguo. Et si le révolutionnaire en culottes courtes avait vu juste ? Si la légèreté de Fernando était coupable ? Le médecin ne le sait pas encore, mais cette rencontre fera basculer sa vie…

Parution : 22 janvier 2021 – Editions : Dargaud – Planches : 160 – Genre : BD, roman graphique, thriller-historique, thriller dramatique

Nicolas Barral a étudié à l’école des Beaux-Arts d’Angoulême sous la houlette de Robert Gigi. Il y croise un aréopage de jeunes cracks aux dents longues dont Christophe Gibelin, futur scénariste. Lors d’un concours de jeunes talents organisé par la FNAC, il est remarqué par Jean-Christophe Delpierre qui l’intègre à l’équipe de ‘Fluide glacial’. Il y dessine les aventures d’Ernest Mafflu, coscénarisées par Stéphane Couston.

Parallèlement, Gibelin lui donne l’occasion d’exploiter une veine plus réaliste, signant pour lui le scénario des « Ailes de plomb » (Delcourt), polar années 1950 à la façon Gabin-Audiard.

À ‘Fluide’, Barral croise un auteur en mal de dessinateur, Pierre Veys. De cette rencontre providentielle naît une collaboration fructueuse qui donne vie à « Baker Street » (Delcourt), puis aux « Aventures de Philip et Francis » (Dargaud), deux séries parodiques permettant au dessinateur d’exploiter la veine humoristique qu’il porte en lui depuis ses lectures assidues d' »Astérix » et de « Lucky Luke ».

Devenu un brin mystique avec l’âge, Barral s’est aussi mis au service du Seigneur, signant « Dieu n’a pas réponse à tout » (Dargaud), en tandem avec Tonino Benacquista.

Enfin, parce qu’en tout dessinateur sommeille un scénariste, l’auteur signe les textes de la série « Mon pépé est un fantôme » (Dupuis), dessinée par son collègue et ami Olivier TaDuc.

En 2012, Nicolas Barral se voit confier par Jacques Tardi la reprise de « Nestor Burma » (Casterman), tâche dont il s’acquitte en adaptant « Boulevard… ossements ».

2014 est encore une année bien remplie : après avoir retrouvé son compère Tonino Benacquista pour un nouveau projet, « Les Cobayes » (Dargaud, 2014), il se lance dans le troisième tome des « Aventures de Philip et Francis », toujours sur un scénario de Pierre Veys.

2017 marque le retour du tandem Benacquista-Barral avec la sortie du « Guide mondial des records » (Dargaud).



Catégories :BD/Romans graphiques, Challenge Polars et Thrillers, Historique, Thrillers/Polars

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7 réponses

  1. Très intéressante découverte BD. Je découvre aussi toute la richesse de ce média depuis quelques années et c’est parfois une belle claque!

    Aimé par 2 personnes

  2. Lecture plus mitigée pour ma part, peut être à cause du scénario très simple…

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