Le Spirou de Christian Durieux : Pacific Palace de Christian Durieux


Sorti en plein confinement, en mai dernier, dans l’hebdomadaire « Spirou » sous le titre « intrigues au Pacific Palace », cette première version du scénario traîne depuis vingt-cinq ans dans les tiroirs de son auteur, jusqu’au jour où il a l’idée de faire de Spirou le personnage principal de l’aventure. 

Le fait d’introduire Fantasio, donne une touche humoristique très plaisante. Pour créer le personnage du président Korda, Durieux s’est inspiré à la fois de Nicolae Ceausescu, dictateur roumain déchu en 1989, et de Jean-Claude Duvalier, Bébé Doc, tyran haïtien, venu se réfugier dans un hôtel en France après sa chute en 1986. Avec la fille de Korda, Elena, il ajoute la dose de romantisme au récit.

L’hôtel lui-même apparaît comme un personnage principal avec ses murs témoins de tout ce qu’ils ont vu, où les couloirs résonnent des pas de ceux qui les ont arpenté.

Le scénario est dense, sans temps morts, permettant une lecture agréable. Les personnages sont très réalistes et ont un goût très actuel, avec la reprise du contexte actuel ainsi que certains faits historiques. On ne peut s’empêcher de penser à ces dictateurs « amis » de le France…

Spirou entre les mains de Durieux, se dévoile amoureux, et plein d’humour au côté d’un Fantasio loufoque mais attachant.

Le dénouement est assez intéressant également et apporte une certaine réflexion et des interrogations… Mais pour les connaître, il vous faudra découvrir cet opus… 

Pacific Palace, un hôtel paisible au bord d’un lac qui l’est tout autant. Spirou regrette déjà d’y avoir fait engager à ses côtés Fantasio, viré comme un malpropre du Moustique. Car l’ex-journaliste reconverti en groom n’a vraiment pas la vocation et ne rate pas une occasion de fâcher M. Paul, leur supérieur hiérarchique. Mais trop tard pour faire machine arrière : un véritable huis clos est décrété et l’hôtel se retrouve sans clientèle et avec un personnel réduit pour accueillir discrètement Iliex Korda, dictateur déchu du Karajan, petit pays des Balkans. Dans ses bagages, d’imposants gardes du corps mais aussi Elena, fille du « Grand Guide » au regard envoûtant, dont Spirou tombe instantanément amoureux. Alors que Fantasio ne rate pas une occasion de provoquer l’entourage du tyran, Spirou essaie de comprendre l’étrange ballet politicien qui se joue presque sous ses yeux.

Parution : 8 janvier 2021 – Editions : Dupuis – Planches : 80 – Genre : BD, roman graphique, thriller

Christian Durieux est né en 1965 à Bruxelles, ville dans laquelle il résida longtemps avant de venir vivre près de Bordeaux en 2008.

Passionné de dessin dès son plus jeune âge, il a la chance de profiter, pendant ses années collège, d’un cours de bande dessinée gratuit prodigué par Bosse et Watch pendant la pause déjeuner des élèves. Bosse remarque vite l’implication et le talent du jeune Christian, alors âgé de 13 ans, et lui propose de rencontrer Alain De Kuyssche, son rédac’ chef chez Spirou. Christian s’y rendra avec ses planches timidement calées sous le bras. Aucune ne sera retenue ! Mais De Kuyssche lui offre une heure de son temps afin de lui prodiguer divers conseils. Un vrai cadeau de la vie… Durieux poursuit ensuite sa scolarité, obtenant une licence de Lettres modernes avant de s’inscrire à l’École d’arts graphiques de Saint-Luc, qu’il quitte au bout d’un an, s’estimant trop vieux pour poursuivre des études ! Il enchaîne alors travaux d’illustrations et de BD divers, en particulier pour le Journal Tintin.

Invité en tant que jeune auteur à une émission de radio recevant quelques pointures du métier telles Berthet et Dufaux, il sympathise particulièrement avec ce dernier. Dufaux, séduit par le dessin de Durieux, l’embarque dans l’aventure « Avel », aux Éditions Glénat, à partir de 1990. Ce thriller psychologique nervé de mystère installe aussitôt Durieux dans le top 10 des auteurs réalistes avec lesquels il faudra compter…

Sauf que Christian aime (se) surprendre. Il entreprend donc, avec Luc Delisse au Lombard, la série « Foudre », thriller futuriste pour lequel il développe un trait plus en rondeur. Durieux emporte ensuite ses lecteurs dans la trilogie « Mobilis », un concentré de mystère pur, scénarisé par le maître Andreas, avant d’adopter un trait enfantin à la fraîcheur totalement réjouissante pour dessiner « Oscar », les aventures d’un gamin orphelin aussi craquant que turbulent, scénarisées par Denis Lapière. Grâce à cette série, qui démarre en 2001 et connaîtra 7 tomes, Durieux peut enfin réaliser son vieux rêve de collégien : être publié dans Spirou ! Toujours chez Dupuis, Durieux signe en compagnie de Jean-Luc Englebert une série jeunesse pleine de monstres et de fantômes : « Gusgus ». Jamais là où on l’imagine, Durieux abandonne alors la BD jeunesse, devenu son terrain de jeu attitré, pour illustrer à partir de 2008 « Les gens honnêtes », une quadrilogie signée Jean-Pierre Gibrat. Christian utilise, pour cette très belle et très sensible chronique à hauteur d’êtres humains, un dessin semi-réaliste terriblement attachant. Durieux, qui a déjà travaillé en solo sur Benito Mambo (1997) et Le pont (2007) réalise par la suite Un enchantement (Futuropolis, 2011), jeu de séduction érudit et onirique se déroulant lors d’une nuit passée au Musée du Louvre. Puis il travaille sur Le captivé (Futuropolis, 2014, scénario de Christian Dabitch), Geisha ou Le jeu du Shamisen (2 volumes chez Futuropolis, 2017-2018, sur un scénario de Christian Perissin).

En 2020, Christian Durieux dépasse son rêve de collégien en réalisant son propre « Spirou », Pacific palace, où il développe un dessin et une intrigue conjointement élégantes. Amoureux de la même femme – la fille d’un dictateur en fuite réfugié dans un palace – les grooms Spirou et Fantasio vont avoir, à cause de lui, fort à faire… Comme beaucoup des albums de Durieux, Pacific palace est réalisé en couleurs directes.

Véritable caméléon graphique, Christian Durieux se fond avec un égal talent sur tous les scénarios qui lui sont proposés comme sur tous les terrains de jeux qu’il choisit de s’écrire. Réaliste sur « Mobilis » (avec Andreas), semi-réaliste sur « Les gens honnêtes » (avec Gibrat), résolument jeunesse sur « Oscar » (avec Lapière), cet auteur total s’offre en outre le luxe de s’essayer à toutes les techniques de dessin et de colorisation, même si la couleur directe est devenue depuis quelques années sa marque de signature.



Catégories :BD/Romans graphiques, Challenge Polars et Thrillers

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11 réponses

  1. Décidément on se régale avec les sorties BD. J’ai décidé d’en lire encore davantage cette année 😊

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  2. Je viens de me procurer les Mademoiselle J, je vais avoir du mal à suivre !
    Bonne soirée, Julie.

    Aimé par 1 personne

Rétroliens

  1. Bilan du Challenge polar et thriller 2020-2021 – Ju lit les mots

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