La nuit est assez vaste pour noyer la petitesse des hommes et leurs turpitudes éphémères 

Ce roman m’a été conseillé il y a bien longtemps maintenant, et j’avais hâte de le découvrir. Quand j’ai pu enfin l’avoir entre les mains, je me suis rendu compte, et ce n’est pas la première fois, que c’était un deuxième tome. Heureusement cela n’a en rien gêné ma lecture, qui a été excellente. Mes attentes, pour une fois, ont été comblées.

Dans Vaste comme la nuit, la capitaine Mathilde Sénéchal a un problème. Un accident survenu dans son enfance, qui la hante, et dont elle n’a aucun souvenir. Autour de cette amnésie, elle tisse une histoire, des histoires ; elle s’imagine tout un tas de choses négatives. Parce que cet accident est survenu un jour particulier, le jour d’une disparition. Et il est temps pour elle de résoudre ces deux énigmes, qui paraissent liées, après avoir reçu une lettre de Lazaret, son ancien chef de groupe. Alors elle retourne dans le village de son enfance, là où se trouvent les réponses, là où elle pourra enfin se libérer de ses entraves mémorielles. Un village où se cachent des secrets, où le silence est élevé au rang de culte. Mathilde devra faire preuve d’abnégation et de volonté pour démêler l’écheveau de ces deux histoires entremêlées.

Pour faire simple, j’ai adoré ce roman. Je l’ai trouvé diablement bien construit. L’auteure m’a embarquée dans une narration originale, entre présent et passé, l’ensemble se rejoignant d’une belle façon. Ici, l’histoire prend son temps, se met en place petit à petit, comme des poupées russes, où on découvre un autre personnage, un secret enfoui, et où des liens s’établissent.

« Les vies sont reliées les unes aux autres par des fils, dit-il en embrassant le panorama d’un geste large. Elles forment une grande tapisserie avec des dessins visibles et d’autres non. Il faut savoir où et comment regarder. Sinon, tu n’es pas libre, tu agis toujours d’une certaine façon sans savoir pourquoi et de mauvaises choses continuent de se produire. Il y a des équilibres à respecter, des trous à combler. »

Aucun rythme trépidant ici, à la manière d’une série télé divertissante ; l’intrigue s’agence sans brusquerie, en finesse, portée par l’élégance et la beauté des mots. Tout s’emboite au fil des chapitres, et avec brio, l’auteure est parvenue à m’emmener vers quelque chose que je n’avais pas imaginé. Même si les flics « casseroles au cul – à gros problème » m’agacent fortement, Mathilde est un personnage attachant, tout comme son amoureux, et Adèle une gamine paumée. Mention spéciale pour Hortense, une vieille dame singulière, aigrie et mauvaise comme la peste, mais pas que.

Et que dire de cette plume, de ce style incroyable, de la richesse de ce texte et du travail réalisé par l’auteure. Je peine à formuler ma pensée ; mais les polars et les thrillers, hormis peut-être ceux de la série noire Gallimard, ne sont généralement pas dans cette veine-là, mais plutôt dans « l’écriture fluide », la facilité de lecture avec un style simple. Je le dis ici en toute humilité, ayant moi-même un style des plus scientifiques. J’avoue que lire un polar de cette qualité est appréciable. Mais c’est sûrement aussi pour cette raison que ce roman n’est pas porté par une nuée de lecteurs enthousiastes. De mon côté, je suis ravie de cette très belle découverte.

« Mais le bonheur en soi n’existe pas, il n’est pas un graal à conquérir. Encore moins une étoile tombée du ciel. Non, ça vient de l’intérieur et de loin, ça monte par des chemins de longue haleine et ça finit par éclore en formant comme des fleurs de sel qui renvoient des touches de lumière à la surface du quotidien. »

Parution : 22 aout 2019 – Éditeur : Fleuve Noir – Pages : 312 – Genre :  policier, polar,  littérature française

La capitaine Mathilde Sénéchal n’aurait jamais imaginé retourner sur les lieux de son enfance, un petit village non loin de Dieppe. Mais quand Lazaret, son ancien chef de groupe, lui fait parvenir une lettre sibylline, elle comprend qu’elle va devoir rouvrir une enquête vieille de trente ans. Qu’elle le veuille ou non, le passé ne meurt jamais. Il a même des odeurs, ces odeurs qu’elle sait identifier comme personne et qui sont aussi son talon d’Achille. Il est temps pour elle de sonder sa mémoire défaillante et d’affronter la vérité

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2024 au 11 Juillet 2025)

Ju lit les mots

– Blog littéraire – Critiques littéraires – Co-fondatrice Prix des auteurs inconnus – Contributrice journal 20 minutes – Membre the funky geek club

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