Salina de Laurent Gaudé la puissance évocatrice du récit

Le cimetière accepte Salina, la femme aux trois exils, celle qui eut un fils haï, un fils colère et un fils pour tout racheter, Salina, la femme salée par les pleurs, condamnée à naître et à mourir en marchant dans des terres inconnues.

J’ai mis du temps à sortir ce titre de ma PAL, pourtant, il n’était pas très loin, puisque j’ai dû le voir au moins une bonne dizaine de fois par jour, pendant plusieurs mois. Comme si nous devions nous apprivoiser. Finalement, je me suis décidée à le lire, juste avant de partir aux Etats-Unis !

Salina de Laurent Gaudé est bien plus qu’un simple roman, c’est un chant de douleur, une ode à la résilience et à la force de l’âme humaine. Dans ce récit magistral, Gaudé nous entraîne au cœur d’une tragédie, où les mots vibrent d’une intensité rare et où chaque page brûle de la passion et de la détermination d’une femme prête à tout pour défendre son honneur, ses désirs et ses aspirations. Dès les premières lignes, on est happé par la puissance narrative de l’auteur, par cette plume envoûtante qui sait si bien faire résonner les cris des cœurs brisés.

Très tôt, Salina est marquée par le destin, et sa vie devient une succession de tragédies et de combats. Mariée de force, humiliée et trahie, elle se dresse contre l’injustice avec une fureur qui ne la quittera jamais. Gaudé retrace la trajectoire de cette héroïne farouche, de sa jeunesse tourmentée jusqu’à ses derniers instants, où, au seuil de la mort, elle fait promettre à son dernier fils de répandre ses cendres dans le désert, là où tout a commencé.

Salina nous parle d’injustice, de vengeance, de maternité, mais surtout de quête de soi et de liberté. Gaudé met en lumière le destin d’une femme prête à tout pour protéger ce qu’elle a de plus cher et pour se venger de ceux qui l’ont blessée. Le roman est aussi une réflexion sur la transmission des histoires, sur la mémoire qui perdure et les récits qui façonnent nos vies. En plongeant dans la vie de Salina, Gaudé nous invite à réfléchir sur la force des liens du sang, la douleur de l’exil, et le désir irrésistible de rédemption. C’est un texte qui résonne profondément, un appel à la résistance contre l’inacceptable et à la quête de justice.

La plume de l’auteur est d’une puissance évocatrice saisissante, avec des envolées lyriques, il réussit à créer une véritable symphonie de mots. Chaque phrase est ciselée, chaque mot choisi avec soin, donnant à l’ensemble une portée quasi mythique. L’écriture est à la fois poétique et lumineuse, capable de capturer la beauté comme la noirceur des émotions humaines. Les dialogues pourtant rares sont percutants, et le rythme narratif est maîtrisé de bout en bout.

Salina est un personnage d’une rare intensité, une figure de proue qui incarne la rébellion contre l’injustice et la volonté indomptable de vivre libre. Son parcours, marqué par la souffrance et le désir de vengeance, est déchirant. Gaudé parvient à créer un univers riche en symboles, où chaque élément du décor participe à l’évocation d’un destin tragique et grandiose.

Salina est un roman d’une grande force, un texte qui laisse une empreinte indélébile dans le cœur de ses lecteurs. Laurent Gaudé, avec son talent de conteur, réussit à donner vie à une héroïne inoubliable, à travers laquelle il interroge la condition humaine, le poids du destin, et la force de la résilience. C’est un livre qui m’a fait vibrer et qui rappelle que, même face à la douleur la plus intense, il existe toujours une lumière, une flamme qui ne s’éteint jamais. Salina est une lecture incontournable pour ceux qui aiment les récits puissants et émouvants, une véritable leçon de courage et de vie.

Je suis curieuse, avez-vous lu ce livre ? Si oui, quel a été votre ressenti. J’ai retrouvé ce que j’ai aimé dans « La langue des choses cachées » de Céline Coulon que j’ai beaucoup aimé et qui fera certainement partie de mes lectures les plus marquantes de cette année. Comme Salina d’ailleurs.


Parution : 14 octobre 2020 – Éditeur : Babel – Pages : 160 – Genre : fantastique, femmes, relation mère-fils, sagesse, contes, légendes, deuil

Qui dira l’histoire de Salina, la mère aux trois fils, la femme aux trois exils, l’enfant abandonnée aux larmes de sel ? Elle fut recueillie par Mamambala et élevée dans un clan qui jamais ne la vit autrement qu’étrangère et qui voulut la soumettre. Au soir de son existence, c’est son dernier fils qui raconte ce qu’elle a été, afin que la mort lui offre le repos et que le récit devienne légende.


Ju lit Les Mots

– Blog littéraire – Critiques littéraires – Co-fondatrice Prix des auteurs inconnus – Membre the funky geek club – Contributrice journal 20 minutes –




Catégories :Actes Sud, Contemporain, Fantastique/Science-fiction/Uchronie/Dystopie..., Littérature française

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21 réponses

  1. Bon voyage aux États-Unis !
    Parfois ce genre de lecture on sait tellement que ça va nous remuer qu’on repousse et pourtant c’est tellement bon !
    Merci pour la découverte ☺️

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    • On y a été en juillet, et c’était franchement un excellent voyage 🙂
      Certains livres nous impressionnent je pense du coup on hésite beaucoup et une fois que c’est fait, c’est une formidable découverte, souvent ou une déception parfois…
      Ravie de te le faire découvrir 🙂

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  2. Merci Julie pour ce partage, une chronique touchante et émouvante ☺️ et qui donne très envie de découvrir ce texte ciselé !

    J’aime beaucoup la plume de Gaudé et j’ai prévu de lire ce roman depuis longtemps. Un jour prochain sans aucun doute, moi aussi j’attends le bon moment

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  3. Tout comme toi, ce roman m’attend depuis longtemps. Contrairement à toi, je le laisse attendre 😃

    De Gaudé je n’ai lu que Le Soleil de Scorta que j’ai adoré, du coup, je n’ose pas lire un autre livre de lui de peur d’être déçue!

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  4. Mais tu vas arrêter de me tenter, toi ! 😆

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  5. Avatar de ducotedechezcyan

    Je ne crois pas avoir déjà lu cet auteur, ce roman pourrait en être l’occasion 🙂

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  6. Une chronique magnifique pour un roman qui ne l’est pas moins. Laurent Gaudé est, à mes yeux, très au-dessus de la mêlée des auteurs francophone. Un peu comme un Sébastien Spitzer. Ils ont un style d’écriture exceptionnel. Merci Julie ! 🙂

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  7. Quelle belle chronique ! C’est tout à fait le genre de livre que j’apprécie, avec un personnage fort doté d’une volonté farouche. Une lecture qui s’avère marquante et que j’apprécierais sans aucun doute.

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Rétroliens

  1. Bilan lectures juillet 2024 – Ju lit les mots

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