– Dis-moi ma fille, j’aimerais avoir tes lumières sur un phénomène assez particulier. Lorsque j’appelle Mathias un mardi pour lui signifier qu’il est urgent que ma progéniture me téléphone, et qu’elle ne daigne saisir son portable que le dimanche suivant, que penses-tu qu’il se soit passé entre-temps ? Une faille spatiotemporelle se serait-elle ouverte au pied du pays bordelais, avalant exclusivement les trentenaires hautaines en trench Burberry ?

– Bonjour maman, moi aussi je suis contente d’avoir de tes nouvelles. Alors que voulais-tu me dire ?

J’écoutais ma mère soupirer à l’autre bout du téléphone alors que j’essayais de contenir mon agacement. C’était sans doute ça, partager les liens du sang.

Kim Hartmann est la lauréate 2024 du prix du roman non publié, imaginé par les éditions Novice (https://novice-editeur.com/). Cette maison d’édition organise tous les ans, en partenariat avec les Espaces culturels E.Leclerc de Normandie, un concours de manuscrits. Un pour les romans, et un autre pour les polars, avec un auteur reconnu comme président de chaque jury.

Cette année, j’ai décidé de lire le roman gagnant, attirée par le titre et le résumé prometteurs, et l’espoir d’une ambiance particulière.

Que nous raconte ce 12 Impasse du Prieuré, qui s’est frayé un chemin jusqu’au sommet de la pile des manuscrits reçus pour ce concours ?

Un couple de trentenaires décide de s’installer dans la campagne bordelaise. Comme beaucoup, ils sont à l’étroit dans leur appartement en ville et aspirent à davantage d’espace et de tranquillité. C’est la jeune femme qui se charge des démarches immobilières, et c’est elle que le lecteur suit au fil des pages. Elle tombe rapidement sous le charme d’une maison, dont le prix est abordable (étrange).

« L’espace était grand et lumineux. Malgré l’odeur de renfermé qui s’était incrustée dans les tissus d’ameublement, la pièce était accueillante et chaleureuse. La salle à manger était reliée au salon par un couloir voûté. Christine m’indiqua le gigantesque escalier en chêne massif qui conduisait aux chambres à l’étage. Les marches grincèrent délicieusement sous notre poids. Je caressai la rampe du plat de la main en souriant. Malgré les travaux et l’entretien nécessaires, j’étais, contre toute attente, envoûtée par le charme de cette vieille maison. »

Avec son conjoint Mathias, ils se décident rapidement à faire une offre (acceptée) et ce malgré un sentiment confus qui habite la jeune femme. Parce qu’il y a un hic. Ce hic est une clause (farfelue aux yeux de Mathias) qui l’interroge et la tracasse : brûler un cierge, chaque jour, dans une sorte de chapelle située dans le jardin de la maison. Et bien entendu, c’est autour de la flamme de cette chandelle de cire que tout va se cristalliser. Après leur installation, la jeune femme est obnubilée par l’histoire qui se rattache à cette maison, et aux anciens propriétaires. Mais il n’y a pas que ça. Il y a aussi ce voisin et ce village, qui de prime abord semblent accueillants, mais qui recèlent des secrets. La jeune femme est pugnace, elle veut comprendre et découvrir ce qui se cache derrière les façades, celle de pierres et celle des hommes. À la limite de l’obsession. Jusqu’au dénouement, étonnant.

L’auteure et sa narratrice m’ont emportée dans le tourbillon de cette histoire. J’ai tourné les pages avec l’envie de connaître les secrets de cette maison, de ce cierge à allumer (sinon il se passe quoi si personne ne le fait ?) et en faisant des hypothèses sur ce qui allait se passer. J’ai suivi cette femme dans ses pérégrinations, comme si j’y étais. Au début, je me suis égarée, car je m’attendais à quelque chose de « fantastique », mais le réel dans lequel est ancré le roman est bien plus troublant. Je me suis attachée à ce personnage qui évolue au fil des chapitres, parfois à son insu, qui se lie à cette bâtisse, qui s’inquiète, se questionne sur ceux qui l’entourent, jusqu’à s’interroger sur elle-même. Honnêtement, j’ai parfois eu l’impression de lire un thriller, où tout s’emboîte à la perfection, au fur et à mesure. La plume de l’auteure m’a plu, jamais je ne me suis ennuyée, elle a su doser les descriptions et les effets, avec une pointe d’humour très appréciable. J’ai aimé cette idée que les maisons peuvent parfois nous habiter, et pas l’inverse. Par ailleurs, j’ai trouvé qu’il y avait un petit je ne sais quoi à la Daphné du Maurier (surtout à la fin). Je suis ravie d’avoir pu découvrir ce roman prenant, à la plume intéressante. Une très belle découverte.

Je remercie les Éditions Novice pour leur confiance.

Parution : 12 septembre 2024 – Éditeur : NOVICE – Pages : 244 – Genre :  thriller

À l’étroit dans leur appartement et fatigués par l’agitation de la ville, Ella et Mathias décident de s’installer à la campagne. À la recherche de leur future maison, le couple tombe sous le charme d’une vieille demeure à un prix dérisoire. Alors que l’occasion semble trop belle pour être vraie, les propriétaires formulent une condition indispensable à la vente : les nouveaux acquéreurs devront respecter la tradition et brûler un cierge, chaque jour, dans la chapelle du jardin. Entre rumeurs, révélations et découvertes, le couple est loin d’imaginer ce qui l’attend.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2024 au 11 Juillet 2025)

Ju lit les mots

– Blog littéraire – Critiques littéraires – Co-fondatrice Prix des auteurs inconnus – Contributrice journal 20 minutes – Membre the funky geek club

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