Pour être tout à fait exacte, je n’ai pas besoin de la présence de mon mari pour n’exister que moyennement. Il est assez fréquent qu’on ne s’aperçoive pas de ma personne; que pour ainsi dire, je ne compte pas. Je n’en conçois pas d’aigreur particulière, je le constate seulement depuis que le mot « lèvres » s’est matérialisé. Il m’apparaît qu’avant mon être doutait de lui-même, mais il ne le savait pas, ou alors d’un savoir confus, lointain, inopérant.

J’ai déjà eu le plaisir de découvrir la plume de Séverine Chevalier avec Jeannette et le crocodile. Avec son dernier opus, Théorie de la disparition, elle change complètement de registre, même si la psychologie de ses personnages reste toujours décortiquée à la loupe.

Elle nous propose ici de découvrir le poids des relations de couple, la place de chacun, mais surtout les dynamiques dans les relations et comment le couple transforme les individualités. Portée par une écriture à la fois poétique et brute, l’auteure explore les non-dits, la mémoire et le vide que ressentent ceux qui s’effacent.

Au fil des pages, l’auteure nous plonge dans une atmosphère qui devient pesante, où chaque détail semble porter une signification cachée. Le récit s’intéresse davantage aux silences, aux souvenirs et aux émotions.

Séverine Chevalier possède une écriture ciselée, minimaliste et évocatrice, qui capte l’essence des émotions sans jamais en faire trop. Elle joue habilement avec les non-dits, le flou et l’ambiguïté, ce qui en fait une lecture étrange mais très profonde.

L’absence d’action soutenue et le choix d’une narration introspective m’ont quelque peu dérouté au début, mais finalement, on laisse bercer par les mots et entraîner les phrases et la narration de Mylène. Mylène qui devient le porte-parole de toutes ces femmes, « petites souris grises » qui s’effacent pour laisser briller l’homme dont elles deviennent l’intendante.

J’ai trouvé ce roman captivant par sa capacité à jouer avec l’invisible. Séverine Chevalier maîtrise l’art du sous-entendu et du détail, rendant cette lecture presque hypnotique.

La Théorie de la Disparition est un roman exigeant, mais fascinant. Loin des thrillers traditionnels, il s’aventure sur un terrain plus intime et sensoriel, tout en pudeur où cette femme de soixante-neuf ans, revient à la vie, après avoir consacré sa vie à l’autre. En disparaissant, elle va finalement renaître. Un bel hommage aux femmes !

Je remercie les Editions de La Manufacture des livres pour l’envoi de ce livre.

Parution : 9 janvier 2025 – Éditeur : La manufacture des livres – Pages : 176 – Genre : littérature française, roman noir,   portrait de femme  

Mylène se considère lucidement comme l’intendante de son mari Mallaury. Une vie simple et banale dans laquelle elle s’occupe de son foyer avec une grande minutie, prolongement du travail consciencieux exercé au service municipal de la ville de Saint-Étienne, quand elle vérifiait les habitations afin de prévenir tout risque de destruction. Mylène veille à ce que Mallaury ne manque de rien, surtout depuis que ses romans connaissent le succès. L’accompagnant dans tous ses déplacements, elle traque le moindre défaut, lisse le moindre pli. Mais un soir, lors d’un dîner entre écrivains, Mylène fait une rencontre qui l’amène à agir étrangement : elle se laisse disparaître. En échappant à son mari pour la première fois, elle se confronte au passé et sort de son silence. La femme de l’écrivain commence à écrire.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 juillet 2024 au 11 juillet 2025)

Ju lit Les Mots

– Blog littéraire – Critiques littéraires – Co-fondatrice Prix des
auteurs inconnus – Membre the funky geek club – Contributrice journal 20
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Catégories :Challenge Polars et Thrillers, Contemporain, La Manufacture des Livres, Littérature française, Thrillers/Polars

Tags:avis livresque, polar, thriller