Chronique d’une apocalypse programmée : Qu’un sang impur de Michaël Mention


Écrire a beau être sa passion, c’est avant tout une persévérance de chaque instant. Une valeur devenue obsolète depuis que la notion d’exigence a succombé à Netflix et au feel good. Époque de merde où les bouquins sont chroniqués par des youtubeurs sans aucune culture, jugés par des lecteurs avides de facile et de trash. Des critères dans lesquels Joël ne se reconnaît pas. Un dinosaure ; c’est ce qu’il est. Et comme tous les dinosaures avant lui, il est voué à l’extinction.


Après La voix secrète, Les gentils, Michaël Mention change de genre et nous plonge dans un thriller apocalyptique qui interroge le tissu même de notre société. Beaucoup y verront un livre post Covid, d’autres le fruit d’une imagination fertile et certains pourraient l’imaginer visionnaire… Il exploite le cadre d’une crise à l’échelle de l’Europe et du monde pour offrir une réflexion percutante sur les dysfonctionnements sociaux et la fragilité du vivre-ensemble. Le roman, à la fois brut et sans concession, met en scène l’effondrement des repères dans un univers où la violence et l’humanité se confrontent.

Le livre débute sur une journée banale, au son de la musique qui fuse dans les tympans et en terrasse d’un bistrot parisien. Une série d’événements en chaîne déstabilisent la ville, l’animalité faite Homme ressurgit, c’est le chacun pour soi, avec une humanité parcellaire. Les autorités réagissent en instaurant un confinement strict et l’angoisse s’empare des citoyens. Rapidement, une drôle d’épidémie déstabilise l’Europe et se propage au reste du monde. Matt, sa compagne Clem et leur jeune enfant, se replient dans leur immeuble, aux côtés de voisins tout aussi pris dans la tourmente. Ce contexte apocalyptique révèle les côtés les plus primaires et les plus complexes de chacun, dans un thriller apocalyptique, à la fois huis clos et fenêtre ouverte sur le monde. Même si toutes les fenêtres ne sont pas bonnes à ouvrir…

L’auteur aborde des thèmes variés, tout en instaurant une tension constante et immersive qui enveloppe le lecteur. Chaque page accentue le sentiment de menace, et le désespoir est tangible et va crescendo.

Le roman dresse le portrait de protagonistes aux personnalités complexes, avec des réactions différentes face à l’effondrement des normes sociales offrant un miroir des multiples facettes de l’humain en situation de crise. La solidarité se niche là où on s’y attend le moins. La force de l’auteur, c’est de montrer toute l’ambiguïté dont l’être humain est capable, que ce soit en temps de crise ou en temps normal.

Au-delà du récit apocalyptique, il propose une analyse mordante sur la société contemporaine : les tensions politiques, les inégalités croissantes et la fragilité de nos institutions sont autant de thèmes explorés avec une lucidité dérangeante, qui peut sembler trop proche de ce que nous avons pu ressentir il y a peu.

Les scènes de violence sont assez crues, explicites, pour ne pas plaire à tous les lecteurs, et même si c’est brutal, parfois choquant, c’est visuel et immersif. L’Homme dans toute sa souffrance et sa bestialité…

Qu’un sang impur, si vous avez compris l’allusion, a tout d’une renaissance, mais au-delà de l’aspect divertissant du roman apocalyptique, c’est une critique acerbe de notre société de consommation où l’être humain est broyé, du fait politique et de ses incohérences, sur l’être humain, mais aussi sur le réchauffement climatique qui devrait être au centre de ses préoccupations, sous peine de se voir disparaître.

Qu’un sang impur est un pamphlet sur la violence politique, sociale et humaine dans sa globalité. Une réflexion incisive d’un monde en délitement, sur fond catastrophique avec une bande de son incroyable. Michaël Mention parvient à fusionner l’horreur d’un scénario apocalyptique avec une critique sociale, interrogeant ainsi les mécanismes du pouvoir et la résilience de l’être humain. Un thriller qui invite à une réflexion sur la fragilité et les travers de notre société actuelle, tout en parsemant des solutions connues, mais ignorées. Le profit au détriment de l’humain, l’entraînerait-il à sa perte ?

Lire un extrait

Je remercie les éditions Belfond pour pour leur confiance renouvelée.

Parution : 6 mars 2025 – Editeur : Belfond – Pages : 336 – Genre : littérature française, thriller, thriller apocalyptique, huis clos, science-fiction, roman noir

Roman apocalyptique, Qu’un sang impur dissèque le vivre-ensemble dans une atmosphère à la John Carpenter, entre 28 jours plus tard et The Walking Dead.

Matt, jeune père de famille, savoure une bière en terrasse à Paris, quand se produit un étrange phénomène : toutes les feuilles des arbres tombent instantanément, avant qu’une onde de choc surpuissante ébranle la capitale. Attentat ? Séisme ? Explosion nucléaire ? À la suite d’un mouvement de panique sans précédent, et en l’absence d’informations, le président décide de confiner les habitants. Matt, Clem et leur fils de quatre ans se retrouvent prisonniers de leur immeuble en banlieue et tentent d’organiser le quotidien avec leurs voisins. Jusqu’à ce qu’une terrifiante épidémie gangrène la population…

Entre solidarité, lâcheté et sacrifice, jusqu’où Matt et Clem iront-ils pour survivre et protéger leur fils ?

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 juillet 2024 au 11 juillet 2025)


Ju lit Les Mots
Blog littéraire – Critiques littéraires – Co-fondatrice Prix des auteurs inconnus – Membre the funky geek club – Contributrice journal 20 minutes



Catégories :Belfond, Challenge Polars et Thrillers, Fantastique/Science-fiction/Uchronie/Dystopie..., Littérature française, Romans noirs, Thrillers/Polars

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25 réponses

  1. je me demande pourquoi il faut en rajouter à la violence actuelle : nous vivons dans un monde absurde et cruel , entre un dirigeant Russe qui veut par les armes rétablir sa puissance, un président Américain fantasque qui joue à la roulette avec la finance mondiale et un président Chinois qui domine l’économie industrielle…cela n’est vraiment pas la peine d’en rajouter il suffit de décrire cette réalité pour être en plein thriller.

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    • On ne peut pas comparer la fiction et la réalité. La réalité a toujours été telle que nous la connaissons, sauf qu’avec les réseaux, cela prend des proportions énormes et qu’en plus cela est plus proche de nous. Pourtant les guerres à travers le monde ont toujours existé, malheureusement, et on s’en préoccupais mois, car loin de nous…
      Je préfère largement lire l’horreur dans un thriller.

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  2. J’en lis beaucoup de bien. Si j’apprécie les thrillers, j’aime encore plus les thrillers qui invitent comme ici à la réflexion.

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  3. Tu décris assez bien ce roman qui, moi, m’a un peu moins convaincue, même si j’en reconnais les qualités.

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  4. Le côté critique sociale et la thématique du réchauffement climatique que tu évoques pourraient me plaire. Mais le côté huit-clos dans cet immeuble me fait un peu flipper ; le retour mitigé de Nath sur cette lecture m’avait convaincue de ne pas m’y aventurer 😉. Je lirai à nouveau l’auteur, mais pas avec celui-ci

    Merci Julie pour ta chronique

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  5. C’est sûrement un roman intéressant, mais le post apocalyptique, je n’en peux plus

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  6. J’ai beaucoup entendu parler de ce roman ! Je n’ai pas encore découvert l’auteur.

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  7. Je n’ai encore jamais lu cet auteur, et je vois beaucoup passer celui-ci. Je ne sais pas encore si je vais me laisser tenter. Je le note tout de même ! Merci pour ta chronique qui éclaire bien le sujet.

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  8. Très tentant ! Mais le côté trop proche du Covid me freine un peu. Trop d’auteurs se sont accaparé ce thème suite à la crise et l’avoir vécu en vrai m’a suffit pour ne pas le revivre perpétuellement de manière livresque.

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  9. C’est bon à savoir. Je note donc les références au cas où 😉 . Merci

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  10. ok, je retiendrai que c’est du brutal… Je dois le lire, il est sur ma très grande pile urgentissime :p

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