Avis express : l’essentiel en quelques mots


Soixante printemps en hiver de Ingrid Chabbert et Aimée De Jongh

Parution : 20 mai 2022 – Pages : 120 – Editeur : Dupuis- Genre : Bande dessinée | émancipation | féminisme | famille

Le jour de son 60e anniversaire, Josy refuse de souffler les bougies de son gâteau. Sa valise est prête. Elle a pris une décision : celle de quitter mari et maison pour reconquérir sa liberté en partant avec son vieux van VW ! Sa famille, d’abord sous le choc, n’aura dès lors de cesse de la culpabiliser face à ce choix que tous considèrent égoïste. Josy va heureusement tenir bon, trouvant dans le CVL (« Club des Vilaines Libérées ») des amies au destin analogue et confrontées à la même incompréhension sociétale… Mais cela suffira-t-il pour qu’elle assume sa soif d’un nouveau départ ? Et qu’elle envisage peut-être même un changement d’orientation sexuelle ? Oui, si l’amour s’en mêle. Ou pas…

Ingrid Chabbert et Aimée De Jongh offrent un récit subtil et profondément humain sur la reconquête de soi à l’âge où la société commence à vous rendre invisible.

Portée par le dessin fluide et expressif d’Aimée De Jongh, cette BD met en lumière cette tranche de vie rarement représentée dans la fiction : celle des femmes « ordinaires » à l’orée de la retraite, coincées entre injonctions sociales, charges familiales et fatigue d’une existence passée à faire pour les autres. Le scénario d’Ingrid Chabbert évite les clichés du « nouveau départ » en un claquement de doigt, pour raconter une émancipation lente, bancale, mais sincère.

À travers Josy, c’est tout un pan de notre société qui se révèle : celui des femmes qu’on n’écoute plus, qu’on remercie poliment après une vie de dévouement, et qu’on juge parfois égoïstes quand elles osent penser à elles.

À une époque où l’on repousse toujours plus l’âge de la retraite tout en invisibilisant les aînées, Soixante printemps en hiver rappelle que la vie ne se mesure pas en productivité ou en rôles assignés. Et que dire « non », même tard, reste un acte de liberté. Un album doux, engagé, essentiel.


Vautrin contre Balzac de Bruno Lecigne

Parution : 2 avril 2025 – Pages : 112 – Editeur : Dupuis – Genre : bande dessinée | adaptation | enquête

Alors qu’il séjourne au château de Saché, près de Tours, Honoré de Balzac a la surprise de recevoir la visite du chef de la sureté de Paris… un certain Vautrin. Ce dernier accuse le romancier de vouloir nuire à sa réputation… La cause ? Un personnage homonyme, maître manipulateur qui n’hésite pas à baigner dans le crime pour parvenir à ses fins, ou celles de ceux qu’il a choisi d’épauler.

S’engage alors un débat autour de ce personnage singulier et protéiforme. Car au-delà de sa morale douteuse, Vautrin est aussi un as de la tromperie. Tour à tour forçat, abbé, banquier, policier, il incarne la figure du criminel au sein de La Comédie Humaine et y occupe une place toute particulière…

À travers cette curieuse rencontre, Bruno Lecigne et Régis Penet interrogent les origines et inspirations de ce personnage et la place du crime au sein de l’œuvre de Balzac.

Une revisite de La Comédie humaine à travers un prisme original : celui de l’opposition entre l’auteur et l’un de ses personnages les plus fascinants, Vautrin. Ancien forçat devenu figure de l’ombre omniprésente dans l’œuvre balzacienne, Vautrin incarne la révolte, la duplicité, la lucidité face aux hypocrisies de la société bourgeoise.

À travers cette confrontation symbolique, l’auteur révèle une lecture politique et presque psychanalytique de Balzac, mettant en lumière les ambivalences idéologiques de son œuvre.

En redonnant à Vautrin sa pleine dimension critique, Bruno Levigne repense la place que nous laissons à l’ordre établi. Une bande dessinée intéressante, qui parle autant de littérature que du pouvoir, du désir, et de la subversion.


Destins coréens de Jung et Laetitia Marty

Parution : 26 mars 2025 – Pages : 144 – Editeur : Delcourt – Genre : roman graphique | adoption | social | enquête | documentaire | résilience |

Joy, tombée enceinte suite à une brève relation avec un étudiant, s’apprête à faire adopter son enfant. Mais tout change lorsqu’elle tombe sur le récit d’un adopté coréen. Sa rencontre avec l’auteur la conduira à annuler la procédure d’adoption… L’auteur, lui, replonge dans les funestes souvenirs de sa soeur décédée, Valérie, qui incarne le destin tragique des coréens adoptés les plus malheureux.

Destins coréens est un roman graphique sensible qui explore l’adoption entre la Corée du Sud et l’Europe à travers le récit de Joy, une jeune femme coréenne enceinte refusant l’adoption, et de Jung lui-même, enfant adopté devenu auteur.

Scénarisé par Laetitia Marty, elle aussi adoptée, le récit de Jung, tisse un dialogue puissant entre la reconstruction identitaire après adoption, et les conséquences sociales d’une grossesse hors mariage en Corée du Sud.

Le dessin de Jung, noir et blanc agrémenté de touches de couleurs, amplifie l’émotion palpable du récit. Ces choix graphiques viennent souligner les différentes émotions comme la honte, et l’espoir.

Un roman graphique particulièrement touchant, avec un savant dosage entre témoignages et critiques de la société coréennes, notamment avec la stigmatisation des mères célibataires.

Un roman graphique qui donne voix à ceux qu’on a longtemps rendus invisibles, et rappelle que les histoires d’adoption ne sont jamais simples : elles laissent des cicatrices, mais peuvent aussi déclencher des actes de résilience individuelle et collective.


Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 juillet 2024 au 11 juillet 2025)


Ju lit Les Mots
– Blog littéraire – Critiques littéraires – Co-fondatrice Prix des auteurs inconnus – Membre the funky geek club – Contributrice journal 20 minutes –



Catégories :avis express, BD/Romans graphiques, Challenge Polars et Thrillers, Dargaud, Delcourt, Documentaire, essai..., Dupuis, Historique, Thrillers/Polars

Tags:, ,

22 réponses

  1. Merci pour le partage Julie. Tes avis donnent envie de découvrir ces trois BD ; j’aime beaucoup le graphisme de Destins coréens.

    Je viens d’en réserver à nouveau à la médiathèque … cela me plait bien de lire régulièrement ce format 😉

    Aimé par 1 personne

  2. Ils me tentent tous et Destins coréens en particulier.

    Aimé par 1 personne

  3. Soixante printemps en hiver a l’air bien sympathique !

    Bonne soirée, Julie.

    Aimé par 1 personne

  4. J’ai aimé le sujet de Destin coreen mais l’album ne m’a pas marqué en lui-même.
    J’aime beaucoup la démarche et le choix de mettre en scène avec douceur et engagement l’héroïne de 60 printemps.
    Toujours aussi sympa ces courts avis

    Aimé par 1 personne

    • Dommage pour Destins coréens, mais je me suis effectivement, comme toi, plus attachée au sujet qu’aux dessins…
      60 printemps m’a plu mais il m’a manqué un je ne sais quoi pour m’attacher aux personnages…
      Contente que ces courts avis te plaisent, ils me permettent de parler quand même de mes lectures sans faire des avis trop longs 🙂

      Aimé par 1 personne

  5. Avatar de ducotedechezcyan

    Les 3 ont l’air intéressants à leur manière 🙂

    J’aime

  6. Les images sont belles, mais je n’aime pas les graphiques. Bon week end

    Aimé par 1 personne

  7. Je peux de nouveau me connecter à ton blog mais pas sûr que tu reçoives les commentaires. Bon week end

    Aimé par 1 personne

  8. Oh là là, j’ai un coup de foudre pour les illustrations de Destins coréens. Je les trouve magnifiques ! Je vais voir si je trouve ce roman graphique à ma médiathèque.

    Aimé par 1 personne

  9. Deux récits et deux styles bien différents mais je suis très tentée par Destins coréens et Soixante printemps en hiver. Merci Julie pour ces idées 🙂

    Aimé par 1 personne

Rétroliens

  1. Bilan lectures Mars 2025 – Ju lit Les Mots
  2. Bilan lectures Juillet 2025 – Ju lit Les Mots

Répondre à toutloperaoupresque655890715 Annuler la réponse.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.