
Le texte déroule autour d’un cas de fusion insupportable entre un fils et sa mère. Nous voyons tout : la pensée de Victor et sa logique implacable, mais aussi la folie de cette logique qui interprète tout, d’Eugénie à « l’homme du kiosque ». Nous voyons même par quel renversement le bourreau incarne simultanément le sauveur de celui qu’il a détruit… Rien ne nous est épargné, et nous ne pouvons que subir le supplice de voir cette mécanique se dérouler jusqu’au son terme. Ce n’est pas un roman psychologique, mais un cas d’école psychanalytique !
Cela vous est-il déjà arrivé d’être subjugué par un talent précoce qui s’affirme dans l’évidence ? C’est ce qui m’est arrivé en lisant Le cas Victor Sommer de Vincent Delareux, écrit à même pas 25 ans, et pourtant d’une maturité impressionnante. Un genre de Joël Dicker du roman psychologique, si vous voulez !⠀
Un petit bout de pitch ? La mère de Victor Sommer (33 ans) a disparu. Son fils ne sait pas comment vivre sans elle : « « Victor, aimes-tu réellement ta mère ? » Cette question directe ne me plaisait pas beaucoup. Je l’ai donc contournée. « Maman m’aime beaucoup », ai-je dit. ». Cette disparition est-elle sa chance, ou son drame ?⠀
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Si Victor Sommer était un personnage de la mythologie, ce ne serait pas Œdipe (il n’épouse pas sa mère). Si c’était un mythe fondateur de la psychanalyse, ce ne serait pas le petit Hans (il ne connaît pas son père). Si c’était un personnage de roman, ce ne serait pas Emma Bovary (« prisonnier d’une vie qui ne lui convenait pas » ? ) Allons, c’est plus compliqué que ça…
Une partie de l’histoire est révélée dès le début, et beaucoup d’entre vous vont vite deviner le reste. Et pourtant… si je vous disais qu’il y a une tension qui ne va que croissant, parce qu’on pressent plusieurs dénouements possibles et qu’on ne veut surtout croire à aucun… ou à la rigueur à un, qui se profile pendant un moment d’éclaircie totalement improbable, mais qui s’avère n’être là que pour décevoir le dernier espoir que nous avions que Victor s’en sorte « autrement ». Bilan : ce roman est un bijou d’épreuve pour nos nerfs de lecteur !
Amélie Nothomb situe Le cas Victor Sommer à mi-chemin entre Les Évangiles et Psychose. Les Évangiles ? Victor, qui a 33 ans au moment de l’histoire, serait-il un nouveau Christ ? Ouh là. Que non, vous vous fourvoyez ! Sa mère, qui en a 66, serait-elle un nouvel Antéchrist ? Ah tiens ! Je n’y avais pas pensé, mais puisque vous le dites… En tout cas, ce que je peux vous dire, c’est que l’auteur, lui, pense qu’une partie de la population élèvera Victor « au rang de martyr ». Une partie seulement, car tout le monde ne sera pas d’accord : voilà un bon début pour devenir un mythe…
Vous allez aussi me demander pourquoi Psychose. Aïe. Je redoutais justement que vous me posiez cette question… mais oui, bien sûr, je comprends l’association d’idées que fait la dame au chapeau, et vous la comprendrez aussi ! Un homme sous la coupe de sa mère même quand celle-ci a disparu, un homme qui dort auprès d’un couteau suisse qu’il pense hérité de son père pour se protéger de cauchemars récurrents : les ingrédients sont là. Mais l’histoire qu’en tire Vincent Delareux n’est pas celle de Psychose. Et comme je ne peux pas vous en dire plus… vous n’avez plus qu’à lire le livre !
Vous commencez sans doute à comprendre pourquoi Victor Sommer est un cas, n’est-ce pas ? Il en évoque beaucoup d’autres, mais il est un nouvel archétype de tout cela réuni.⠀
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Comme tous les grands romans, il revisite plusieurs mythes et déroule une histoire intemporelle, mais il le fait avec un regard qu’on ne connaissait pas encore. Croyez-moi : c’est une plume, et c’est une vision du monde, que nous voyons naître sous nos yeux. Vous voilà prévenu.e.s !
Parution : 25 mai 2022 – Éditeur : L’Archipel – Pages : 201 – Genre : thriller psychologique, policier, disparition
Faut-il commettre l’irréparable pour être enfin quelqu’un ? À 33 ans, Victor Sommer mène une vie monotone qui lui pèse. Secrètement, il aspire à devenir quelqu’un. Une ambition entravée par sa mère, infirme autoritaire et possessive qui l’empêche de prendre son envol. Le jour où celle-ci disparaît de façon mystérieuse, Victor est confronté à un monde qu’il n’a jamais appris à connaître…
Catégories :Les avis de Marceline Bodier, Thrillers/Polars
ça a l’air original, mais quand même un peu anxiogène ^^
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J’avoue que Marceline m’a donné envie de le découvrir ! Je me laisserais peut-être tenter 😉
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Dicker n’a pas une écriture géniale, entre nous…. mais je note ce roman, on ne sait jamais 🙂
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J’ai tendance à être d’accord avec toi… Mais je suis curieuse, il est dans ma PAL 😉
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La curiosité littéraire n’est pas un vilain défaut ! Malgré mes récriminations sur « la vérité sur l’affaire… », le final m’avait troué le cul 🙂
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Globalement, on accroche bien, c’est vrai que la fin est bluffante 😉
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J’aime être bluffée, quand je lis !
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Peut-être que celui-ci te fera vibrer 😉
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Qui sait ? :p
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:-p
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