Chronique d’une souveraineté fissurée : Le Voleur de la Reine, tome 2 : La reine d’Attolie de Megan Whalen Turner


Il m’arrive parfois de croire que ses mensonges sont une forme de vérité, mais je n’ai jamais pris sa vérité pour un mensonge.

Un ennemi opiniâtre ne valait-il pas mieux qu’un allié indécis ?


Lire ce second volet m’a donné l’impression d’ouvrir un livre qui ne ressemblait déjà plus tout à fait au premier. Là où Le Voleur jouait avec le mystère, le rythme lent et l’ironie de son narrateur, ce second tome abandonne la légèreté pour entrer dans un territoire plus sombre, plus âpre, un brin cérémoniel. Le roman semble décidé à nous faire comprendre que la fantaisie n’est plus de mise : désormais, tout se joue dans les arcanes du pouvoir.

Le choc fondateur du récit, brutal, irréversible, marque une frontière entre les deux tomes. J’ai été frappée par la manière dont Megan Whalen Turner ose cet acte, non pour provoquer, mais pour interroger ce que le pouvoir exige, détruit, reconstruit. Ce tournant, redéfinit Gen, sa place, tout autant qu’il redéfinit notre regard. On entre dans ce roman comme on franchit une porte qui grince un peu trop fort : on sait que tout a changé.

La Reine d’Attolie, s’impose comme une figure fascinante, pas une reine froide, mais une femme qui a appris à survivre. Sa dureté est un masque, et l’auteure ne cesse d’en montrer les fissures, même minuscules. Le roman révèle, par touches discrètes, le prix de la souveraineté, ce qu’elle exige d’elle, ce qu’elle lui arrache. C’est cette ambivalence qui m’a le plus impressionnée, la reine est à la fois crainte, vulnérable, autoritaire et fragile. Comme à son habitude, le texte n’essaie jamais de tout expliquer, il suggère, murmure, et cela suffit pour totalement nous immerger.

Quant à Gen, il traverse ici l’une des évolutions les plus touchantes que j’aie pu lire. Le jeune voleur insolent laisse place à un personnage meurtri, qui avance dans un espace où chaque geste demande un effort, où chaque émotion se heurte à ce qu’il a perdu. Le roman prend le temps nécessaire, pour faire sentir le poids du traumatisme, la reconstruction laborieuse, les moments où l’on se perd soi-même avant de se retrouver autrement.

Ce tome explore aussi, avec retenue, la relation entre Gen et la reine. Rien n’est romantisé, rien n’est simplifié. Ce qui s’installe entre eux est fait de silences, de culpabilité, de tendresse qui n’ose pas dire son nom. J’ai aimé cette pudeur : elle donne au roman une profondeur où le sentiment se faufile entre deux personne.

En refermant La Reine d’Attolie, j’ai eu la sensation d’avoir quitté un récit d’aventure pour entrer dans une réflexion sur la souveraineté, la loyauté et les cicatrices invisibles. C’est un tome plus grave, plus intérieur, mais aussi plus ambitieux. Une chronique de pouvoir et de pardon, où chaque personnage apprend que la force véritable naît souvent de ce que l’on croyait être une faiblesse.

Je remercie les Editions Monsieur Toussaint Louverture et Babelio pour l’envoi de ce livre dans le cadre d’une Masse Critique privilège.

Parution : 3 octobre 2025 – Éditeur : Monsieur Toussaint Louverture – Traduction : Yoko Lacour – Pages : 288 – Genre : littérature américaine, fantasy, fiction,

L’Attolie est un royaume en apparence civilisé, parsemé de palais, de jardins clos et de salles feutrées. Mais derrière ses colonnes et ses dorures sophistiquées se jouent des machinations aussi féroces que cruelles. Sa reine, jeune, belle et redoutée, n’a jamais eu le luxe d’être naïve. Pour accéder au pouvoir, elle a dû écraser ses ennemis intérieurs ; pour le conserver, elle devra affronter ses ennemis extérieurs.
Car avec les royaumes d’Eddis et de Sounis, une guerre pourrait éclater à tout instant. Les frontières sont défendues, certains villages brûlent et ses ambassadeurs négocient à couteaux tirés… Mais le plus grand danger qui menace la reine d’Attolie, elle le sait, tient à l’existence d’un seul homme. Un jeune voleur.
Gen a changé. Depuis son aventure mythique en Attolie, ce n’est plus un vaurien insolent et talentueux : c’est un héros adulé et craint autant par ses adversaires que par les siens, une arme aussi imprévisible que mortelle, que personne ne semble pouvoir manier.
Tandis que les espions s’affolent, que l’Empire mède attise les braises du conflit pour asseoir son pouvoir sur ces terres côtières, et que chaque décision risque de renverser les alliances d’un soir, un duel sans merci s’engage entre deux esprits fabuleux : une reine qui ne peut se permettre la moindre erreur, et un voleur qui, peut-être, n’en a jamais commis aucune.


Challenge American Year – The Cannibal Lecteur (Du 15 Novembre 2025 Au 15 Novembre 2026)


Ju lit Les Mots

– Blog littéraire – Critiques littéraires – Co-fondatrice Prix des auteurs inconnus – Membre the funky geek club – Contributrice journal 20 minutes –




Catégories :Challenge An American Year, Fantastique/Science-fiction/Uchronie/Dystopie..., Littérature américaine, Monsieur Toussaint Louverture

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24 réponses

  1. J’ai également préféré l’intensité et la profondeur de celui-ci. Alors j’espère que le souffle ne retombera pas dans le prochain tome.

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  2. C’est chouette que tu aies pu enchaîner les deux tomes !

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  3. Un second opus qui tient ses promesses, et qui est différent du premier. Il y a une suite ou juste ces deux tomes ?

    Les couvertures de ces romans sont vraiment très belles.

    Merci Julie ☺️

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  4. tu es partie pour lire les 7 tomes ? quand on aime on se laisse facilement séduire.

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  5. J’ai hâte de le découvrir. Mais avant ça le tome 1 😉 merci Julie pour ce retour 🙂

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  6. Ayant eu du mal avec la personnalité du protagoniste dans le peu que j’ai lu, je suis ravie de découvrir qu’il évolue. Quant à la Reine d’Attolie, tu donnes envie de la rencontrer.

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  7. J’ai les deux tomes en audio. Bon week end

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  8. Une lecture intéressante, donc, mais je vais toujours passer mon tour 😉

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